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Lorraine nadon fines herbes : du coeur et de la tête !

Œuvrant à St-Lin-Laurentides, Lorraine Nadon est une productrice de légumes et fines herbes chevronnée qui a su s’adapter aux nouveaux courants et dont les produits frais ornent les plus belles assiettes du Québec. Rencontre avec une femme d’exception, une femme d’affaires certes, mais guidée par sa passion.

« Mon père disait qu’avoir une ferme, c’était avoir de la misère. Ne souhaitant pas que ses filles connaissent ces tracasseries, il nous a incitées à aller à l’école pour apprendre d’autres choses… » Mais quoi qu’en pense le paternel, la passion habitait déjà Lorraine Nadon qui a fait à sa tête… en suivant simplement son cœur. Et c’est très jeune que cette fille de producteurs a plongé dans l’entreprise familiale. Elle avait à peine 7 ans à son premier jour de travail : « Ça fait 42 ans que, de la St-Jean-Baptiste à l’Halloween, je passe plusieurs nuits par semaine au Marché Central à Montréal pour y vendre nos produits. Je me lève vers 23 h 30 pour être au marché vers deux heures du matin et je m’arrête faire quelques livraisons en cours de route. Encore aujourd’hui, même si mon père est décédé, c’est avec ma mère de 72 ans et avec mon conjoint, qui s’est joint à l’entreprise il y a une douzaine d’années, que je fais rouler la ferme », raconte-t-elle, enthousiasmée.

De la tomate aux fines herbes

« Au début, mes parents cultivaient principa­lement des tomates et des fraises. Mais lorsque j’ai commencé à m’impliquer un peu plus dans l’entreprise, j’ai vite réalisé que la compétition était grande et qu’il fallait se démarquer pour survivre. Il y a 27 ans, donc, j’ai décidé de me mettre à cultiver des fines herbes. Nous avions déjà des clients italiens et grecs. Puisque ces derniers consomment beaucoup de fines herbes, je me suis dit que ça allait être viable comme culture. Or les gens de mon entourage n’y croyaient pas vraiment, pas même le MAPAQ qui n’avait pas osé subventionner mon projet. Certains me disaient carrément que c’était une aventure casse-gueule ! Heureusement, mes parents, eux, y ont cru. Mon père ne m’a pas prêté d’argent, mais il m’a prêté sa machinerie, m’a offert un lopin de terre et, surtout, il m’a donné son temps et partagé son expérience. J’ai donc commencé par le persil — pour satisfaire mes clients italiens — et me voilà avec plus de 25 variétés à ce jour. C’est ce que j’appelle une réussite et c’est ma plus grande fierté jusqu’à maintenant. »

L’heure est au changement

Ces derniers temps, madame Nadon a songé à laisser totalement de côté sa production de fines herbes : « Le milieu des fines herbes est déjà saturé, il est temps de passer à autre chose », affirme celle qui, par ailleurs, remarque que les Québécois pure laine sont trop peu nombreux à cuisiner les fines herbes. « Non seulement les Québécois de souche ne cuisinent pas avec les herbes, mais ils ne cuisinent pas, point à la ligne, déplore-t-elle. Les émigrés, eux, s’intéressent à la popote et aux fines herbes et ils représentent, à mon sens, environ 95 % des acheteurs. »

Des fines herbes aux mini légumes

Souhaitant répondre à la demande de ses clients restaurateurs souvent inspirés de la France — un pays que Lorraine Nadon juge 15 ans en avance sur le Québec quant aux produits frais offerts —, l’entrepreneure se spécialise dorénavant dans la production de mini légumes, abandonnant tranquillement sa production de fines herbes.

La tête pleine de nouvelles idées, madame Nadon se concentre maintenant sur la production de petits et fort mignons légumes, dont des mini navets, mini zucchinis de couleurs variées, mini pâtissons et une foule d’autres encore. « Ces petits légumes poussent deux fois plus rapidement que les gros, ils regorgent de vitamines et ils sont plus faciles à apprêter puisqu’il ne suffit que de les laver, même pas besoin de les couper, avant de les cuisiner », explique la femme d’affaires. En tant que consommateurs, vous n’avez qu’à être attentifs à ce que l’on vous sert dans les grands restaurants… Vous verrez à quel point ces produits magnifiques sont de plus en plus présents et comment ils décorent à merveille les assiettes.

Infatigable, cette femme d’idées semble emprunter un chemin bien défini, qu’elle prend plaisir à tracer elle-même. Lorraine Nadon sait définitivement où elle s’en va ! « Je fais actuel­lement des tests avec un légume ancien, le topinambour. J’essaie de voir comment je peux le transformer. J’en cuisine une rémoulade pas piquée des vers… Commercialiser des produits transformés est à mon avis un moindre casse-tête qu’est celui de la production, où l’on doit faire, entre autres, avec la météo. En vieillissant, je cherche à me simplifier la vie », explique-t-elle.

Jongler avec des conditions difficiles

Pour les producteurs, est-ce toujours aussi difficile de jongler avec la météo? « Un brin, oui », répond-elle. En effet, comme tous les gens de son milieu, celle-ci doit accepter la dure réalité du climat québécois. Mais au-delà de la météo, elle affirme avoir d’autres ennemis en affaires : « Ce n’est pas facile de demeurer compétitif avec les producteurs provenant de pays où la main-d’œuvre est si peu chère. Ça fait toute la différence, vous savez », dit celle qui engage des étudiants le temps des récoltes pour lui donner un coup de pouce.

Une clientèle exigeante

Évidemment, les temps ont bien changé. « À l’époque, nos clients, à la Place desproducteurs située au Marché Central, se servaient à même le camion. Aujourd’hui, on reçoit par télécopieur, téléphone ou courriel des commandes que l’on prépare à l’avance. Nos clients, surtout des restaurateurs, des traiteurs et des propriétaires d’épiceries fines, sont toujours à la recherche de nouveaux produits pour impressionner leur propre clientèle. Néanmoins, la publicité que l’on fait ici et là et notre bonne réputation qui a fait son chemin attirent même des clients du Nouveau-Brunswick et de l’Ontario », précise fièrement Lorraine Nadon.

Le succès dans la mire

« À l’époque, mes parents ont été qualifiés d’avant-gardistes, ne serait-ce que pour m’avoir laissée travailler au Marché Central à travers un milieu pratiquement exclusivement masculin. À mon tour, je pense aussi être visionnaire et d’avant-garde, essayant toujours, en surfant sur Internet par exemple, de trouver des nouvelles façons de faire, des nouvelles graines et des nouveaux produits pour éviter, par exemple, d’utiliser des insecticides tout en continuant de protéger au mieux mes récoltes. En agriculture, il faut accepter d’évoluer. Avec les nouveaux produits, on y va d’un apprentissage par essais et erreurs. On doit parfois se réorienter et changer notre façon de faire l’année suivante afin d’augmenter notre production. C’est pour toutes ces raisons que j’ai mon entreprise dans la tête 24 heures sur 24 », avoue-t-elle. Cette femme d’affaires essaie cependant de vivre une journée à la fois : « Autrement, je serais toujours stressée et ça, ce n’est pas bon pour ma santé ! », lance-t-elle.

Une passion qu’elle partage

« Non seulement il faut aimer faire pousser le produit, mais il faut aussi aimer le faire découvrir et le vendre. C’est entre autres pourquoi je donne plusieurs conférences dans différentes sociétés d’horticulture. J’aime faire goûter les nouveaux produits au monde et j’aime leur proposer de nouvelles recettes. » Selon la productrice, les jeunes d’aujourd’hui ne savent plus cuisiner, ce qui est sa plus grande déception. « J’ai encore du mal à comprendre que certaines familles se nourrissent quasi exclusivement de plats préparés alors qu’il y a tant de beaux et bons produits qui poussent au Québec et qui ne sont pas compliqués du tout à cuisiner. Mais, à la source, je pense qu’il faut mieux éduquer les commerçants de fruits et légumes pour que les consommateurs soient bien informés quant au choix qui s’offre à eux. Par exemple, manger un fruit pas assez mûr ou mal conservé, ça ne donne pas envie de revivre l’expérience. La saveur, c’est ce qui reste dans notre mémoire, c’est ce qui fait que l’on va ou non racheter le produit ultérieurement. »

Il ne reste plus qu’à souhaiter à cette productrice un bel été, à l’image de son travail et de sa persévérance. De nature positive, madame Nadon se garde le mot de la fin : « Croyez-moi, avec tout ce qui s’en vient, 2010 sera notre année », assure-t-elle, un sourire dans la voix.

Au diable les légumes parfaits !

La productrice Lorraine Nadon insiste sur le fait que les gens qui veulent se nourrir sainement devraient cesser de rechercher la perfection : « Si vous ne voulez pas trouver de traces de pesticides ou d’insecticides sur vos fruits et légumes, arrêtez de rechercher uniquement des feuilles impeccables et sans trou, ou encore, les légumes qui ont des formes parfaites. Même si mes produits ne sont pas certifiés biologiques, j’encourage le mouvement. Les gens doivent d’abord et avant tout comprendre ce que ça implique, au niveau visuel, de manger plus naturel. »

Les jardins de Stéphanie

Ça vous donne l’eau à la bouche, toute cette fraîcheur ? Que ceux et celles qui aimeraient découvrir les différents produits de Lorraine Nadon visitent le lien suivant : www.jardinsstephanie.com. Vous y trouverez, entre autres, les territoires desservis en ce qui a trait aux paniers de produits frais qui sont livrés dans les environs de St-Lin-Laurentides.

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